mutations de l’abstraction
Exposition collective “D’une génération l’autre, mutations de l’abstraction” à la Galerie Bessières, Chatou. 2023

Commissariat Philippe Cyroulnik

Vues de l’exposition.

Texte de Philippe Cyroulnik :
Amentia Siard-Brochard associe dans une économie de moyens des gestes et des matériaux. L'intervention est minimum dans ses moyens, essentielle dans son impact. Sans ostentation il s'agit de faire émerger l'indicible d'une différence, l'ombre d'une trace, l'écho d'un corps, l'esquisse d'une intervention ou l'ébauche d'une différenciation. Les dessins peuvent se condenser en une tache, une note colorée ou une annotation formelle (comme on souligne un détail ou entoure une faute). Une légère intervention de l'artiste, une inflexion minimale de la forme d'un bois tourné, de la texture d'un matériau ou d'un support, ou encore l'altération d'une surface métallique par une combustion constituent ces actions modestes qui les transforment. Elles inscrivent ces écarts qui font œuvre des choses les plus anodines.
Cette épure des moyens, cette concentration sur ce qui va engendrer l'oeuvre est un des aspects de son
travail. Déplacé de son contexte ou réagencé, un matériau mobilier peut devenir tableau, un laiton passe partiellement au feu, une sculpture. On perçoit dans son mode de travail la place qu'a eu pour l'artiste des expériences comme celles du Minimalisme, du Process-art ou de Support-Surface. Sa singularité s'y est épanouie, développant dans une retenue volontaire une poétique du matériau et du geste. On pense à ces miracles de simplicité et de poésie formelle qu'ont incarné des artistes comme Fred Sandback ou Richard Tuttle. Chez elle l'œuvre advient beaucoup dans « l'impulse » qui la préfigure, et dans le léger tremblement des choses qu'elle produit ; dans ces petits riens qui changent tout.